Après notre étude critique des transformations de l’enseignement supérieur, nous nous devions de proposer un « contre-modèle » synthétisant nos propositions pour la collaborations entre les établissements du site.

Voici donc nos Principes incontournables, tels que nous les avons soumis à divers élu⋅es et responsables de l’Université de Lyon et des ses établissements membres.

Principes incontournables
pour une nouvelle politique de site

Les principaux établissements d’enseignement supérieur et de recherche lyonnais et stéphanois se sont engagés dans un projet Idex (Initiative d’excellence) qui vise à les regrouper en une « université-cible » dont les Principes incontournables ont été rendus publics à l’automne. Ces principes ont suscité de nombreuses critiques dans tous les établissements, mais c’est sur la base de ceux-ci que se sont ouvertes les discussions préalables à la création de l’université-cible, et qu’a été fixé un périmètre excluant l’université Lyon 2.

Si nous partageons le constat d’un échec de la ComUE à créer une réelle dynamique de coordination entre établissements, nous rejetons le modèle proposé dans le cadre de ces Principes :

  1. parce qu’il participe de politiques nationales délétères : les Idex créent une violente hiérarchisation des sites et des établissements d’enseignement supérieur et de recherche, et nous ne croyons pas en un système à deux vitesses qui ne ferait que renforcer tous les mécanismes de reproduction sociale ;
  2. parce qu’il construit un nouvel établissement sans tenir compte des spécificités de ceux qu’il remplace, et constitue une expérimentation de la libéralisation de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Notre rejet n’est cependant pas stérile. Afin d’étayer notre vision du système universitaire par des propositions concrètes, nous proposons donc de travailler à la nécessaire refondation du dialogue inter-établissements du site à travers le prisme des principes suivants — que nous considérons de fait comme incontournables.

1 | Vision, objectifs et valeurs

L’objectif est de promouvoir une Université ouverte à toutes et à tous, fondée sur une recherche extensive, exigeante et collaborative, et sur un enseignement libre et émancipateur. Elle propose un maillage cohérent des différentes disciplines dans le paysage universitaire régional, tout en respectant la singularité des différents établissements.

Elle joue également un rôle fondamental dans un certain nombre d’enjeux contemporains cruciaux, dont la transition écologique est un aspect essentiel. S’inscrivant dans le temps long, elle promeut une recherche indépendante et libre des contraintes de rentabilité immédiate.

C’est cette conception de la recherche sur le long terme qui nourrit la visibilité de l’Université, fondée sur la qualité plutôt que sur une logique d’évaluation et de classement.

2 | Les engagements académiques

Les formations délivrées doivent être à la hauteur des valeurs universitaires que nous défendons :

  • La diversité des formations sera préservée, et leur répartition sur le territoire doit être au cœur de nos préoccupations. L’innovation pédagogique et les nouveaux cursus seront bien sûr encouragés, dès lors qu’ils ne se font pas au détriment de l’offre de formation existante.
  • L’organisation des formations laissera la place à une démarche pédagogique collective, plutôt qu’à un système de prescriptions et d’évaluations exogènes, normatives et inefficaces.
  • Les études de premier cycle seront entièrement ouvertes, car la sélection n’est pas une solution aux problèmes de l’Université. Nous défendons un premier cycle exigeant, première étape d’un cursus universitaire tourné vers l’acquisition de connaissances et cohérent avec la poursuite d’études en master.
  • Les diplômes délivrés seront des diplômes nationaux, respectant le cadrage national des formations et des frais d’inscription.
  • Si la formation professionnalisante n’est pas la mission première de l’Université, cette dernière devra néanmoins tout mettre en œuvre pour aider les étudiants dans leur insertion professionnelle.

La qualité, l’indépendance et l’exigence de la recherche seront garanties :

  • Les liens forts de la recherche scientifique avec les enjeux de la société civile sont indéniables. Pour autant, nous défendons l’indépendance des structures de recherche, et l’équité entre disciplines dans le financement de la recherche.
  • Il s’agit d’échapper à la logique de classement, en promouvant un travail collaboratif et un fonctionnement collégial de la recherche.
  • La publication ouverte des résultats de la recherche selon les standards de l’Open Access doit être un principe fondamental.
  • Le recrutement donnera la priorité au projet scientifique évalué par les pairs. Il se fera prioritairement sur un statut d’enseignant-chercheur, fonctionnaire d’État. Tout sera fait pour endiguer la précarité des jeunes chercheurs.

3 | Structure et organisation interne

Une fusion des établissements du site est exclue. La personnalité morale et juridique des différents établissements garantit leur indépendance. Ils conservent leurs budgets propres et leur autonomie dans le recrutement.

Les établissements doivent conserver une taille humaine, une répartition territoriale équitable et un périmètre disciplinaire pertinent. La singularité de leurs missions, qu’elles soient nationales ou territoriales, sera garantie.

La gestion des carrières, fondée sur le statut de la fonction publique, ne saurait s’entendre que nationalement.

L’organisation du travail des personnels BIATSS prendra en compte leur épanouissement, ainsi que la valorisation de l’organisation collective à l’échelle locale.

Proposant de nombreuses interactions avec la société civile, l’Université ne demeure pas moins un espace privilégié permettant à chacun·e une libre appropriation du campus et de ses ressources (appropriation qui est incompatible avec un usage commercial de ceux-ci).

L’Université doit s’engager contre la précarité étudiante, et donner aux étudiants contraints de travailler à côté de leurs études toutes les chances de réussite dans celles-ci.

4 | Principes de gouvernance

La coopération entre établissements à l’échelle du site est coordonnée par des instances composées, pour au moins deux tiers de leurs sièges, de membres élus au suffrage universel direct. La prise de décision collégiale nous semble en effet un élément primordial dans la création d’une dynamique collective à l’échelle du site, qui permette l’implication de chacun⋅e.

La mise en place de cette coopération se doit d’être transparente et collégiale.

Les étudiant⋅es sont activement intégré⋅es à cette coopération et aux circuits décisionnels, en tant que principaux destinataires de la structure universitaire.

Les personnels exercent au quotidien leur participation à la définition de leurs conditions de travail.

5 | Inscription dans l’écosystème territorial

Afin de pouvoir assurer ses missions de service public, nous ne concevons pas de regroupement d’établissements sur un modèle autre qu’intégralement inclusif. Dans cette perspective, distinguer plusieurs périmètres irait à l’encontre d’une conception fondée sur la coopération universitaire. Le projet Idex, instituant plusieurs périmètres (non pertinents, qui plus est), contribue à hiérarchiser les différents établissements entre eux, établissant de fait une mise en concurrence.

Les partenariats socio-économiques, indispensables à l’ancrage de l’activité de recherche, se feront sur la base des valeurs et du fonctionnement universitaires, et ne sauraient subordonner la recherche à des logiques économiques de court terme.


Document rédigé à l’initiative du collectif étudiant inter-établissements « Idexit ».

Contacts :
idexit@framalistes.org
idexitlyon.wordpress.com


Télécharger en PDF

Laisser un commentaire