CA de l’Université de Lyon : un tirage au sort pour le moins contestable

Une nouvelle annulation du CA de l’Université de Lyon

En juin dernier, nous rapportions ici que le tribunal administratif avait jugé que les élections de juin 2019, remportées par Idexit, étaient annulées laissant la ComUE sans conseil d’administration et sans président après le départ pour Montpellier de Khaled Bouabdallah.

Le CA de l’Université de Lyon, une coquille vide annulée par le tribunal à de nombreuses reprises

Cette annulation laissait entrevoir un espoir démocratique sur le site : le système électoral, profondément antidémocratique et non représentatif comme présenté ici ou , allait-il être réformé ? L’enjeu, comme nous l’écrivions l’année dernière, était « avant tout que l’Université de Lyon, qui porte de grands projets transversaux et gère d’importantes masses d’argent public, soit gérée par des instances fonctionnelles et démocratiques. » Cependant, au lendemain de cet énième revers juridique pour la ComUE, le même système électoral était proposé aux CA des établissements membres de l’UdL…

Un tirage au sort criticable

En janvier 2021, nous avons appris avec amusement qu’un nouveau CA de l’UdL serait élu par…… tirage au sort ! Étaient « éligibles » l’ensemble des représentant·es élu·es des différents collèges (enseignant·es-chercheur·euses de rang A/B, BIATSS, étudiant·es). Le périmètre de ce tirage au sort posait d’ailleurs question : des représentant·es du CA de l’Université de Saint Etienne ont été tirés au sort alors même que ce CA a été dissous, l’ENISE n’était plus représentée au CA de l’UdL, et à Lyon 2, les représentants de la présidence au sein du CA de l’UdL ont semble t-il été désignés avant même la réélection de Nathalie Dompnier, vendredi 5 février. 

Ce système de « vote », qui peut renvoyer à des tentatives historiques de système démocratique n’a été débattu nulle part, ni à l’Université de Lyon ni dans les différents établissements membres. Il a été imposé, nouvel exemple du fonctionnement opaque et antidémocratique de la ComUE. 

Résultats

Dans le collège étudiant, le tirage au sort a donné les résultats suivants :

– Milena Kauffmann (IEP liste à l’Unisson) titulaire et Ruben Lambersy (IEP liste à l’Unisson) suppléant

– Elodie Boisgontier (VetAgro Sup) titulaire et Lucie Dumas (INSA) suppléante

– Nelson Degluaire (Lyon 2, Solidaires Étudiant·es) titulaire et Flavie Berdu (VetAgro Sup) suppléante

– Thomas Darne (Saint-Étienne, UNI) titulaire et Clément Luy (ENS, liste unique Forum) suppléant

Une nouvelle preuve de représentativité : les universités de Lyon 1 et Lyon 3 n’ont aucun·e représentant·e étudiant·e au conseil d’administration de l’UdL, alors qu’elles rassemblent près de la moitié des étudiants du site ! 

Le premier CA étant convoqué pour le 26 févirer,  les élu·es des syndicats membres d’Idexit y prendront toute leur part et vous tiendront informé.es des décisions prises. Nous faisons le voeu (pieux ?) que la gestion de l’argent public et des moyens attribués à la ComUE soit plus transparente à l’avenir, et puisse bénéficier à l’ensemble des étudiant·es du site Lyon-Saint-Étienne. 

Questions diverses et vague de démission

Nous avons rapporté lundi que es élu·es étudiant·es, dont les élu·es membres de l’association Idexit, ont transmis les questions diverses suivantes au CA avant la séance. Ces questions abordent le fonctionnement de l’UdL et son utilité pour les étudiant·es. Peut être que pour une fois, le CA de l’UdL sera un lieu de débat et de discussions utiles pour l’ensemble de la communauté étudiante…

De plus, nous avons appris qu’au moins deux administrateur·ices tiré·es au sort avaient démisionné du CA. Iels invoquent « l’illégalité de leur statut » et refusent « d’occuper une siège (un strapontin) pour donner l’illusion de la démocratie alors que les décisions se prennent ailleurs. » Un autre démissionaire invoque l’impossibilité d’être « contre la fusion jusqu’au 29 janvier 2021 et d’intégrer le CA de la COMUE quelques jours après. » et dit « avoir une vision très différente de l’ESR, des universités françaises, de la recherche, des formations, des enseignant·es-chercheur·euses, de la place des personnels BIATSS dans les universités ». Ces démissions sont encore une preuve d’une nécessité de dialogue, de transparence et de démocratie dans la conception du système électorale…

Tout cela promet un premier CA mémorable vendredi dont nous ne manquerons pas de commenter les décisions sur le site Idexit au cours des semaines à venir !

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L’ENS en ébullition

A l’ENS de Lyon, beaucoup d’événements se passent dans le calme feutré des cercles universitaires et ne sont donc pas visibles de l’extérieur. Pourtant, depuis quelques semaines, l’ENS est en ébullition, pour dire stop au déni de la direction et du président Pinton sur les questions de santé étudiante et les violences sexuelles et sexistes.

Photo de l’ENS de Lyon, toujours vide, mais où une gronde étudiante monte sur des sujets de santé étudiante et de violences sexistes et sexuelles

C’est d’abord la publication des résultats d’une grande enquête sur les formations et la santé, menée par les élu·es étudiant·es en 2019 (disponible ici), qui a mis le feu aux poudres. Les résultats de cette enquête sont éloquents et montrent une augmentation des troubles de la santé depuis la précédente vague d’enquête, en 2015. Ils montrent aussi les forces comme les faiblesses du modèle de scolarité impulsé par l’équipe présidentielle de l’ENS. Tous ces éléments, bien qu’appuyés sur une démarche de traitement des données au sein du laboratoire de l’éducation, ont été balayés par la présidence, qui, dans un mail lapidaire, a parlé d’un rapport « à charge », rempli « d’attaques personnelles », qui aurait « choqué » de nombreux·ses enseignant·es-chercheur·euses.

Cette réponse reprenait les éléments de langage d’un courriel courroucé des directions des départements de sciences exactes et expérimentales, que nous avons pu nous procurer. Dans ce courriel, les directeurs et directrices de 6 départements faisaient part à la présidence de l’ENS de leur « désapprobation de la démarche des élu·es étudiant·es », témoignant d’une « attitude qui n’est pas celle d’un dialogue constructif » et qui risquait « de dégrader l’image de l’établissement ». La seule ouverture accordée par le président n’était ainsi que la désormais rituelle et nécessaire « instruction du dossier », qui ne manquera pas de faire parler d’elle dans les semaines suivantes.

Ces premières réactions ont suscité l’ire d’un grand nombre d’enseignant·es et de chercheur·euses, qui ont publié dès la semaine suivante une lettre ouverte au président de l’ENS, rappelant la nécessité d’un dialogue avec les étudiant·es. Certains passages sont sans détour un désaveu (de plus) pour le président Pinton : « Ce qui « choque » le président de l’ENS, ce n’est donc pas que des élèves et étudiants ou étudiantes de l’ENS souffrent, c’est que des étudiant·es fassent une enquête montrant cette souffrance, la rendent publique et donnent leur point de vue sur ses causes ». Pour ces enseignant·es (un tiers des titulaires de l’ENS, quand même !), l’enquête doit être prise en compte, car elle met des chiffres, pour beaucoup et même au-delà des signataires, sur une réalité qui est déjà connue depuis longtemps. Sans aucune prise en compte par la direction de l’Ecole…

Deuxième étape : déni des violences sexistes à l’Ecole

Deux semaines plus tard, rebelote et grande émotion lors d’un CHSCT sur les violences sexistes et sexuelles. Lors de la présentation d’une enquête du syndicat CGT sur ces agissements au sein de l’établissement, la présidence a, selon le compte-rendu syndical, demandé de « mesurer les propos » et de nouveau parlé d’« attaques personnelles », allant jusqu’à menacer de quitter la réunion. Le compte-rendu évoque une fin de CHSCT « ignoble », où la présidence aurait dressé un parallèle entre le tapage nocturne et les faits de violences sexuelles.

Au-delà de ces éclats de voix, l’émotion est grande dans la mesure où l’ENS apparaît comme en retard dans la prévention et la prise en charge des violences sexistes et sexuelles touchant ses personnels et ses étudiant·es. Les dispositions de la circulaire du 9 mars 2018 semblent peu respectées, tant en termes de formation que de mise en place d’un dispositif d’écoute, ce que déplore le syndicat CGT dans son communiqué. La réponse apportée à de multiples reprises semble être toujours cette « instruction du dossier », qui, pour les représentantes CGT, ne correspondrait à rien de concret.

Détournement d’un jeu vidéo, montrant la réaction de la Présidence de l’ENS face à la nécessité d’agir sur les VSS

Ce nouvel épisode a créé une grande émotion à l’ENS, notamment au sein de la communauté étudiante. En témoignent les nombreux détournements et memes publiés sur les réseaux sociaux dans les jours qui ont suivi la publication des comptes-rendus de la séance.

Détournement de la campagne du gouvernement sur le respect des gestes barrières, mettant en scène Jean-François Pinton et la rituelle « instruction du dossier »

Si cette réaction courroucée de la présidence a pu provoquer une vive émotion, c’est parce qu’il y a une récurrence « inquiétante », selon les termes d’un communiqué des élu·es étudiant·es, de moments où la présidence nie publiquement ou cherche à relativiser les résultats d’enquêtes révélant des problèmes liés à la santé, aux formations, à la violence ou au harcèlement au sein de l’établissement. Alors même que ces problèmes ont émergé largement dans le débat public, et qu’il serait sans doute bénéfique pour « l’image de l’école » d’en prendre la mesure pour y remédier. C’est le sens d’un appel qui a été lancé par plusieurs associations de l’ENS (appel que l’on peut retrouver ici), dont le syndicat étudiant ÉCHARDE, membre de notre collectif, à se rassembler jeudi midi pour dire stop au déni de la direction de l’ENS.

Lyon 2 : une continuité qui relance ses défis

Ce vendredi 5 février, Nathalie Dompnier pour la liste AGIR a été largement réélue à la présidence de l’Université Lyon 2, bien qu’il ait fallu attendre un second tour pour cette reconduction. En effet, si le résultat ne laissait aucun suspense, le premier suffrage a tout de même vu plusieurs listes syndicales du personnel et des étudiant-e-s revendiquer et glisser dans l’urne un bulletin blanc, pointant un bilan contrasté.

De la gestion des conditions de travail du personnel critiquée (y compris des contrats étudiants), ce qui n’est pas une nouveauté dans l’établissement, à l’intervention régulière des forces de l’ordre à l’occasion de mobilisations étudiantes sur les campus, les éléments à charge sont nombreux. Quelques points positifs ont également pu être relevés. Aussi la liste adverse d’enseignants-chercheurs Changer Lyon 2 dont nous peinons encore à comprendre l’harmonie (mais non sans tendance élitiste) a fait peser la balance du Conseil d’Administration vers la continuité. D’ailleurs, les vice-présidences les plus importantes semblent en voie d’être conservées par les mêmes personnes pour un vote ce vendredi 26 février.

C’est ce même jour que les conseils centraux délibéreront sur les deux vice-présidences étudiantes, pour qui le syndicat Solidaires étudiant-e-s Lyon présente deux candidats, avec le soutien de l’UNEF. Ces deux organisations sont arrivées respectivement en première et troisième position des scrutins dans le collège usagers et rassemblent à elles deux bien plus de la moitié des suffrages exprimés aux élections de décembre dernier. Celles-ci ont beaucoup tardé (elles étaient initialement prévues en mars 2020), et ont vu entrer l’UNI au Conseil d’Administration, qui n’a d’ailleurs pas hésité à suivre les consignes de vote de la liste Changer Lyon 2 pour les désignations des personnalités extérieures comme pour la candidature de Guillaume Protière, directeur de la Faculté de droit.


Il reste à déterminer si la liste AGIR acceptera le défi de cohabitation syndicale suivant une logique de démocratie étudiante ou préférera le confort d’investir durablement la FAGE. Ce deuxième choix confirmerait une tendance bureaucratique des universités de province, éludant divers enjeux de l’ESR au profit d’une ambivalence entre représentativité d’intérêts estudiantins et initiatives subventionnées.

Les listes « Bouge ton campus avec GAELIS » dont nous avions remarqué la peine à se constituer via des appels sur les réseaux sociaux et le faible nombre de noms y figurant, n’ont pas tardé à faire de l’œil à Nathalie Dompnier en créant visiblement un compte twitter à l’effet de la féliciter et témoignant la « hâte de travailler avec l’équipe ». Il serait inquiétant que la dynamique de collusion entre cette organisation et les présidences, déjà très présente à Lyon 1, déteigne sur Lyon 2, entre contentement excessif et approche trop bienveillante de l’IDEX.

Une bibliothèque provisoire a vu le jour sur le campus de Bron. L’accès aux ouvrages imprimés et le nombre de places assises sont très fortement limités en attendant la construction de la nouvelle BU, qui ne sera pas livrée avant 2023


Sur l’échec de l’université-cible, les débats avant le vote ont permis de mettre en lumière des préoccupations partagées et un diagnostic qui se rapproche. La présidence sortante peut même se louer d’avoir été antérieurement écartée du projet, et désormais reconduite songe au statut d’établissement expérimental. A l’avenir la place des sciences sociales et du campus de Bron au sein du site seront plus que jamais à défendre.


C’est sous ce deuxième mandat que va enfin démarrer la construction du Learning Centre (projet bientôt rebaptisé « La Ruche ») à Porte des Alpes, promis de longue date mais qui ne cessera pas de faire parler de lui. Enfin la mise en place d’une cellule discrimination, harcèlement, violences sexistes et sexuelles dans l’établissement devrait voir le jour dans les prochains mois, un projet attendu dont on attend de voir les moyens d’actions réels.